Tu as certainement vu, si tu me suis aussi sur les réseaux sociaux, que je suis en plein travaux de rénovation sur un de mes appartements.

Un locataire est donc parti. Il m’a laissé l’appartement dans un état de crasse absolu. Bon, une remise au goût du jour était dans tous les cas programmée, histoire de remettre sur le marché locatif un logement qui apporte de la valeur… Un de mes maîtres mots !

D’ici 1 bon mois, je dois repasser par la case Remise en location.

Seulement, en tant que proprio bailleur, il y a des règles et points essentiels, mais pourtant méconnus, à connaître pour sécuriser les relations avec ses locataires.

Et cette semaine, pour la toute 1ère fois sur le blog, je laisse la main pour en parler… J’ai le plaisir d’accueillir une experte dans le domaine “très sexy” du droit immobilier, Claire, ancienne clerc d’huissier de justice et blogueuse, auteur du blog https://recouvrement-facile.com .

A toi Claire….

Les locataires, il faut les “bichonner” : ils vous financent votre immeuble de rapport. Parce qu’on n’est pas dans le monde des Bisounours, voici les clés pour sécuriser votre opération vis-à-vis des locataires.

On parle dans cet article uniquement de l’aspect location. Pour toute autre question, je ne peux que vous inviter à consulter un notaire ou un avocat spécialisé.

Obtenir les dossiers de location auprès de l’ancien propriétaire

Logiquement, vous avez déjà consulté les dossiers de location des locataires actuels avant votre achat. Il y a :

– le contrat de location et les justificatifs de situation. Vous savez, ces pièces qui sont maintenant strictement réglementées.

– l’acte de cautionnement (voir mon astuce sur ce sujet en fin d’article)

– l’état des lieux d’entrée

– l’historique des paiements (ou “état locatif”)

Dossier locataire

Photo Rick Schwartz

Demander aux locataires de justifier de leurs revenus actuels ?

En tant que nouveau propriétaire, pourriez-vous demander aux locataires en place de justifier à nouveau de leur situation et de leurs revenus ?

Article 22-2 de la loi du 6 juillet 1989 : ces pièces ne peuvent être demandées qu’en vertu d’un contrat de location et avant sa signature. Ne jouez pas les cadors, les locataires ne sont pas idiots ! Vous encourez une amende administrative de 3000 Euros maximum pour une personne physique (vous et moi), jusqu’à 15 000 Euros maximum pour une personne morale (comme une SCI). De quoi éclater la renta !

Et les dossiers des anciens locataires, ce n’est pas mon problème non ?

Parce que je suis juriste et que je veux votre sécurité, j’envisage toujours “le pire”, pour vous protéger. Dans la vraie vie, je suis fun et optimiste Winking smile

Winking smile

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Demandez au vendeur de votre immeuble de vous laisser la copie des dossiers des anciens locataires, au moins en remontant jusqu’à 3 ans après leur départ. Pourquoi ? Article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989 : “Toutes actions dérivant d’un contrat de bail sont prescrites par trois ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer ce droit.” En pratique, je ne pense pas que vous aurez un litige aussi longtemps après un départ, mais il est tout à fait possible de recevoir n’importe quel courrier d’une administration, ou simplement une régularisation des charges à répercuter sur un locataire qui est parti quelques semaines avant que vous n’achetiez l’immeuble. Vous serez bien content de retrouver, dans l’état des lieux de sortie, la nouvelle adresse que le locataire sortant a déclarée (si l’ancien propriétaire a eu le réflexe de la noter…), un éventuel acte de cautionnement, les échanges de courriers… A noter que pour les baux commerciaux, les actions se prescrivent par deux ans, mais les juristes considèrent que le loyer commercial est rattaché à la prescription de cinq ans.

Changement propriétaire

Photo Bruno Parmentier

Et les vieux courriers des locataires actuels, ce n’est pas mon problème non plus ?

Pour un exemple édifiant sur l’intérêt de bien connaître les échanges passés de courriers entre propriétaire et locataire, ce cas d’un nouvel acquéreur qui n’avait pas été informé de la demande de renouvellement du bail commercial par le locataire. Autrement dit, le locataire avait adressé sa demande au vendeur, l’ancien propriétaire : cliquez ici pour découvrir le résumé de l’affaire et la solution, sévère, de la Cour de cassation. Ça pique !

Attention également à l’article 1751 du Code civil qui prévoit la cotitularité du bail pour l’époux (ou le partenaire de PACS) du locataire, dès lors que le propriétaire est informé du mariage ou du PACS de son locataire. Ainsi, si le locataire en a officiellement informé le propriétaire, vous devrez donner congé aux deux époux ou partenaires, même si un seul nom figure sur le bail… Tout ceci à condition que le locataire d’origine puisse bien prouver avoir informé le propriétaire ! Sinon, votre congé ne vaudra pas à l’égard de l’autre. Je ne veux pas vous faire peur, juste vous faire comprendre que ça vaut la peine de se pencher sur l’administratif aussi pour ne pas commettre d’erreur dans votre investissement Winking smile

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Obtenir le carnet de santé de l’immeuble

Bruno vous en parle déjà sur son blog, je serai donc brève sur l’importance de connaître l’historique de votre nouvel immeuble. Soyez attentifs aux charges de l’immeuble et particulièrement à la répartition des charges récupérables entre locataires. Cela vous sera bien utile pour votre propre calcul (l’article 23 de la loi du 6 juillet 1989 est complet sur la question.)

Comment notifier le changement de propriétaire ?

L’article 3 de la loi du 6 juillet 1989 impose de porter officiellement à la connaissance des locataires le changement de propriétaire en lui indiquant son nom et son domicile (ou sa dénomination et son siège social pour une SCI par exemple), par “notification”. Une notification se fait par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Evidemment, en pratique, vous connaissez peut-être déjà les locataires et leur avez déjà donné le RIB, mais la loi impose quand-même cette formalité. Méfiez-vous surtout en cas de loyer impayé suite au changement de propriétaire : le locataire est-il de mauvaise foi ou a-t-il simplement “oublié” de changer le bénéficiaire du virement ? D’où l’intérêt d’une notification “officielle”, qui ne laissera plus de doute. La loi rappelle qu’une notification peut toujours être faite par signification d’huissier : c’est la solution si vos locataires ne cherchent pas ce recommandé. Coût d’une signification ? Entre 80 et 85 Euros TTC, sachant que je vous recommande de prendre contact avec l’huissier avant toute démarche pour connaître le tarif !

Pour le bail commercial : toute la question reste, ici aussi, de protéger le locataire de bonne foi qui payerait son loyer au propriétaire d’origine… Vous trouverez sur Internet des modèles de lettre de “notification au locataire du changement de propriétaire”, inspirez vous et informez le locataire au plus vite. Parfois, c’est le notaire qui s’en charge quand il traite votre dossier d’achat de l’immeuble. Dans certains cas, j’ai même appris que le notaire peut faire intervenir le locataire à l’acte de cession pour lui rendre ce changement opposable. Peu importe la solution que vous choisissez, protégez-vous au minimum en le faisant par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou par acte d’huissier.

Acheter immeuble

Photo Thomas Lasserre

Vigilance sur les dépôts de garantie lors de la signature chez le notaire

Le locataire doit s’adresser au nouveau propriétaire pour récupérer le dépôt de garantie qu’il a versé à l’entrée dans le logement ou le local, même si cette somme n’a pas été remise par l’ancien propriétaire au nouveau propriétaire lors de la vente : 3ème Civ., 08.092016, n°15-19169. Cette règle est d’ailleurs rappelée par l’article 22 de la loi du 6 juillet 1989 (dernière ligne – les juristes disent “in fine”, ça donne sans doute l’air intelligent Winking smile

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)

Petite astuce pour l’acte de cautionnement

L’acte de cautionnement est transmis automatiquement au nouveau propriétaire car c’est un accessoire au contrat de location. Soyez vigilants : certaines clauses “type” peuvent encore apparaître dans l’acte de cautionnement et prévoir que l’engagement prend fin en cas de changement de propriétaire. Utiliser cela comme argument de négociation supplémentaire ? Pourquoi pas !

Je fais quoi si un des locataires ne paye pas ses loyers ou est en procédure d’expulsion ?

Jetez rapidement un œil sur mon schéma des délais d’expulsion et à mes meilleurs conseils pour gagner du temps et de l’argent en procédure d’expulsion. Ces deux articles vous permettront d’anticiper et de savoir dans quoi vous vous engagez vraiment, en l’utilisant comme argument pour négocier à la baisse le prix d’achat de l’immeuble, au lieu de prendre les jambes à votre cou sans peser le pour et le contre. Vous ne pourrez plus dire que vous ne saviez pas !

Merci à toi, Claire, pour tous ces conseils précieux. Il est hyper important, pour nous Bailleurs, d’anticiper les éventuels contentieux. Et de sécuriser au max nos investissements.

La gestion locative est une partie souvent oubliée et négligée, alors que c’est crucial pour nous de s’y pencher afin de garantir la rentabilité de nos investissements…

N’hésite surtout pas à poser des questions d’ordre juridique à Claire juste en dessous.

Dis-moi en commentaire si tu as déjà eu des “mésaventures” juridiques avec tes locataires ? Et quelles solutions tu as trouvé pour résoudre ces litiges ?